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Santé

Intégrer l’activité physique dans la prise en charge des cancers


Améliorer la qualité de vie et l’état de santé, optimiser les traitements anticancéreux, réduire les effets secondaires… L’activité physique adaptée (APA), qui manque encore d’adhésion de la part des patients et de coordination au niveau national, pourrait profiter d’une meilleure communication ou encore d’une interaction avec les autres interventions non médicamenteuses.

Une nouvelle étude met en exergue les avantages de l’activité physique dans la prise en charge des pathologies chroniques, en particulier les cancers. Menée par une équipe de l’université de Montpellier et de l’Institut du cancer de Montpellier, sous la houlette de Grégory Ninot, cette revue de la littérature a été publiée dans le Bulletin du cancer d’avril 2020. Elle vise à aborder les apports de l’exercice pendant et après les traitements. Les programmes pouvant être exploités comme soins complémentaires représentent alors, selon les auteurs, des interventions non médicamenteuses (INM) à part entière. 

Activité physique, sédentarité, APA… le point sur les différents concepts

Pour commencer, quelques définitions sont précisées. D’une part, l’activité physique comprend les activités de loisirs, ainsi que les activités professionnelles, les activités domestiques et les transports. L’article rappelle alors que l’OMS (Organisation mondiale de la santé) invite les adultes en bonne santé à pratiquer au moins 2 heures par semaine d’activité physique aérobie (ou exercices d’endurance) d’intensité modérée. Il s’agit, par exemple, de la marche, du vélo, de la natation ou encore du jardinage et des tâches ménagères. Comme l’explique l’auteur, ce niveau de pratique représente le minimum pour efficacement prévenir les cancers et diminue la probabilité de développer une telle affection de 17 % (selon une étude de cohorte réalisée en 2016). Dans le détail, le risque est abaissé de 10 à 27 % pour le cancer du sein, de 22 à 27 % pour le côlon et de 22 à 27 % pour l’endomètre.

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D’autre part, l’activité physique adaptée (APA) est distinguée : elle représente une intervention non médicamenteuse et peut être exploitée comme soin de support pendant un traitement oncologique ou après. Cela consiste, à partir d’un bilan initial, à proposer des programmes adaptés sur une période donnée et coordonnés par un professionnel diplômé. Les séances peuvent d’ailleurs faire l’objet d’une prescription et d’un suivi médical, ainsi que d’une prise en charge par l’Assurance maladie.

Derniers concepts définis dans l’étude et qui sont également des INM : les méthodes de physiothérapie et les thérapies manuelles. Pratiquées par un kinésithérapeute, elles sont jugées en lien avec l’activité physique en ce sens qu’elles « mobilisent le corps dans une visée rééducative ».

Conséquences de l’inactivité physique sur les cancers

Si l’activité physique montre ses bienfaits en matière de prévention, l’inactivité physique et la sédentarité représentent des facteurs de risque des cancers, selon les chercheurs. Plusieurs données sont alors avancées : la mortalité par cancer s’avère accrue par les comportements sédentaires. En outre, le risque de cancers du côlon et de l’endomètre augmente avec le temps passé assis devant la télévision. Et, en parallèle, l’activité physique semble diminuer avec l’arrivée de la maladie : d’après une étude française menée en 2012, 53 % des patients ont baissé leur niveau d’activité physique ou complètement arrêté. 

Selon l’auteur, l’annonce du cancer déclenche un processus appelé « cercle vicieux du déconditionnement », indépendant du stade de l’affection ou de l’état nutritionnel. Il résulterait d’un réflexe de longue date : la guérison d’une maladie passe par le repos. Or ce repos peut s’avérer néfaste et aggraver certains symptômes, comme la douleur, la fatigue et les nausées. Les raisons sont exposées : « Le patient adopte un mode de vie plus sédentaire qui dégrade le métabolisme, fragilise l’immunité et accélère la fonte musculaire ». Progressivement, cette diminution de l’effort apporte des réactions physiologiques et psychologiques en cascade, qu’elles soient conscientes ou non. D’un côté, la fatigue musculaire engendre une sédentarisation qui déclenche une dégradation musculaire. De l’autre, une fatigue cognitive entraîne une baisse de motivation à l’activité, une impression de perte des capacités physiques, puis une kinésiophobie (peur de l’effort). Le risque de voir apparaître une symptomatologie dépressive est alors important. L’inactivité physique peut donc affecter l’état de santé général du malade et causer d’autres pathologies.

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Mise en place d’une activité physique adaptée 

Face à ce constat, des programmes d’APA ont été associés aux traitements anticancéreux dès le début des années 2000. L’auteur met en exergue leur triple ambition. Tout d’abord, ils réduisent les symptômes, tels que la fatigue, les douleurs, les troubles du sommeil, les nausées ou encore les lymphœdèmes. En outre, ils préservent l’état de santé des patients et leur condition physique, ce qui permet de limiter le déconditionnement physique, la perte d’autonomie et la cachexie (perte de la masse musculaire squelettique). Enfin, ils présentent l’avantage de « potentialiser l’efficacité des thérapies biologiques ».

Malgré cela, l’article souligne une certaine inégalité dans l’installation de tels programmes en France. Alors même que de nombreux efforts ont été consentis : décret n° 2016-1990 encourageant la prescription d’APA par les médecins, plans Cancer, recommandations des autorités, mise à disposition de locaux par les autorités, etc. Comme l’affirme Grégory Ninot : « Force est de constater l’hétérogénéité de l’offre de pratique d’activité physique et sa distance vis-à-vis des attendus scientifiques. L’intégration d’un programme en APA dans le parcours de soins dès le diagnostic d’un cancer est loin d’être une réalité ». Ajoutant que pour obtenir l’adhésion des patients, ces programmes doivent être considérés comme des soins, et non seulement comme des préconisations des pouvoirs publics.

Des recommandations pour une meilleure adhésion

L’étude de la littérature fait ressortir plusieurs aspects à prendre en compte dans le développement de cette pratique afin d’obtenir l’engagement des patients. Établir des programmes dosés et personnalisés s’avère souhaitable. En outre, le bilan initial des capacités physiques est particulièrement important : les tests d’aptitude à l’effort permettraient déjà de motiver un changement. En parallèle, la sécurité est cruciale, d’où l’intérêt d’un accompagnement par des praticiens formés aux interventions non médicamenteuses. De plus, l’utilisation des nouvelles technologies (podomètre, vêtements intelligents, serious game, etc.) peut être utile en encourageant une prise de conscience et en offrant aux professionnels de santé un accès à des informations biologiques. L’auteur insiste également sur la nécessité d’élaborer un discours clair sur les interventions non médicamenteuses, parfois perçues, à tort, comme des thérapies alternatives. Autre point : le déploiement d’interventions « multimodales », qui inclueraient des ateliers d’éducation thérapeutique ou encore des solutions nutritionnelles.

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En conclusion, l’équipe prône la réalisation de nouveaux essais cliniques, notamment sur « la survie et la prévention des récidives », l’adaptation des APA au type de cancer, à son stade ou au mode de vie du malade. Ou encore sur la compréhension des mécanismes impliqués dans l’évolution du cancer et activés par l’exercice physique : « Cette compréhension plus holistique permettra probablement dans les vingt prochaines années la combinaison avec d’autres interventions non médicamenteuses pour ralentir la progression de certains cancers en complément des traitements biomédicaux anticancers ». Il s’agit également de mesurer le bénéfice économique de ces programmes afin d’appuyer un éventuel remboursement.

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